Campanita - L'Épée de Vérité, Tome 6 : La foi des répouvés

Je me suis un peu renseignée, et il semblerait que Terry Goodkind soit le genre d'auteur à prendre la mouche si on lui dit qu'il écrit de la fantasy. J'imagine que cela est du au fait que, la fantasy étant, avec la SF, le polar et d'autres genres, encore considérée par certains comme n'étant pas de la «vraie littérature», il y a des auteurs qui complexent au point de renier l'appartenance de leur œuvre au genre en question. Et c'est bien dommage. Voyez-vous, le cycle de L'Épée de Vérité, aux yeux son géniteur, n'est pas de la fantasy mais une série de romans pleins de philosophie et abordant d'importants thèmes humains. La magie, les sorciers, les épées légendaires, les créatures fantastiques et tout le reste, c'est du bonus si j'ai bien compris. Ma critique du tome 1 doit être plutôt insultante du coup.

Bah, je veux lire pour le plaisir de lire. Je continue à trouver cette saga agréable, et pour moi, c'est tout ce qui compte. Mais voyons plutôt ce que nous réserve le sixième acte de cette «œuvre philosophique pleine de thèmes humains».

L'âme du feu s'était terminé sur une note dépressive: Kahlan est dans un sale état, pas mal de personnages sympathiques sont morts, et les Andériens ont voté contre Richard, se condamnant stupidement à devenir les esclaves de l'Ordre Impérial, dont la progression ne semble pas pouvoir être endiguée.

Forcément, le Sourcier de Vérité a le moral dans les chaussettes. Il perd tout espoir de voir le Bien triompher, et décrète que le monde étant trop con et trop masochiste pour être sauvé, lui il va retourner en Terre d'Ouest, sa région natale, pour vivre pépère dans une cabane en bois avec sa femme et sa fidèle Mord-Sith. Bref, il traverse sa période dans le ventre de la baleine, et quand son armée envoie des messagers pour savoir quand le Seigneur Rahl compte sortir de sa léthargie, il les envoie bouler.

Jusqu'à ce que débarque Nicci, une Sœur de l'Obscurité aux motivations tellement nébuleuses qu'elle-même ne les comprend pas entièrement. Personnage quelques fois mentionné depuis le tome 2, on découvre que Nicci a visiblement quelque chose en plus que ses consœurs, et ça, même Jagang le sent. Devenue sa pute préférée (quoi? Je ne vois pas quel terme conviendrait mieux) et surnommée «la maîtresse de la mort» dans l'Ancien Monde où elle sème la terreur, elle est pourtant une personne se sacrifiant constamment pour le bien des autres. Endoctrinée depuis toute jeune par sa mère et le frère Narev, le leader d'une bande de fanatiques (oui, encore des fanatiques, il y en a un paquet dans cette série!) contrôlant l'Ordre Impérial, l'envie de Nicci d'aider les miséreux atteint un stade tel qu'elle en vient à faire des choses complètement absurdes. À côté de ça, elle cherche désespérément un sens à sa vie, et décide alors de partir dans sa propre quête (et Jagang la laisse partir, privilège de favorite!)

Évidemment, cette quête passe par capturer Richard et à tenter de le faire souffrir. Mais bon, quelque part, celui-ci avait peut-être besoin de ça pour se secouer et retrouver l'envie de se battre. Et bien sûr, Nicci elle reviendra dans le droit chemin et deviendra une alliée.

Concernant le personnage de Nicci, j'hésite. Est-elle une anti-héroïne/anti-méchante complexe à la personnalité torturée, ou une grosse idiote agaçante, tarée et bornée? J'avoue que mon cœur a balancé entre les deux tout au long du tome.

Venons-en maintenant à l'aspect politique, car ce ne serait pas vraiment L'Épée de Vérité si on ne nous décrivait pas une société sous le joug d'un quelconque modèle sur lequel l'auteur avait envie de donner son avis. Cette fois, nous visitons l'Ancien Monde remodelé par les idéaux de Jagang et de son mentor le frère Narev, et Richard et Nicci passent près d'un an à Altur'Rang, la ville natale de l'empereur. On y est noyé dans ce qui me semble être une caricature du communisme façon ex-URSS (mélangé avec l'idée que l'Humanité est souillée par nature). J'avoue volontiers que la politique, l'économie et cetera ne sont pas mon fort, et peut-être que je me trompe, mais j'ai l'impression que le trait est trop gros pour être réaliste...Je suppose que tout cela servait avant tout à faire évoluer Nicci, qui devrait devenir un personnage plus important.

Richard va bien entendu remettre de l'ordre dans tout ça, et ouvrir les yeux de tout le monde. En plus d'y aller avec sa méthode habituelle, qui consiste à supporter des efforts et de la douleur physiques surhumains, nous découvrons également que le brave petit guide forestier est aussi un sculpteur de génie. Reprenant l'idée que la magie et l'art peuvent être liés (rappelez-vous le peintre du premier tome), on exploite ici comment l'expression artistique peut-être utilisée comme une arme de manipulation de l'inconscient collectif, via la statuaire horrible et déprimante de l'Ancien Monde.

Pour compenser les réflexions politico-socio-économiques gonflantes, le roman alterne avec quelques traditionnelles batailles dans la neige menées par Kalhan and co dans le Nouveau Monde. Je n'aurais jamais cru que lire des stratégies militaires me passionnerait autant. On retrouve avec plaisir Zedd, Verna et Warren (qui sera tué...Mais euh! C'était un de rares qui ne m'avaient jamais énervée!). Et Cara s'est trouvé un mec. Ça fait du bien de la voir s'humaniser, même si les Mord-Sith perdent à mes yeux le côté terrifiant installé dans le premier tome avec Denna.

Et pour une fois, je n'ai pas trouvé le dénouement trop précipité, tout prend bien le temps de se mettre en place.

Tome précédents

La première leçon du Sorcier
La pierre des larmes
Le Sang de la Déchirure
Le temple des Vents
L'âme du feu

Tomes suivants

Les Piliers de la Création
L'empire des vaincus
La Chaîne de Flammes
Le fantôme du souvenir
L'ombre d'une Inquisitrice
La Machine à présages

La série télévisée Legend of the Seeker